Retrouvez Nos limites chroniqué par la revue en ligne Réseau-Regain !
« No limit ! » : notre société est devenue une usine à frustrations. « Toujours plus ! », promet-elle aux foules globalisées, comme si le réel devait se plier à nos caprices. Mais ce qui est illimité est fade, informe, évanescent : émanciper l’individu de gré ou de force, l’arracher à ses déterminismes, c’est le soumettre aux marchands de chimères. Une fois abolies les frontières entre les cultures, entre l’homme et l’animal, l’homme et la machine, l’homme et la femme, que reste-t-il au consommateur déraciné ? Le double empire de l’artificiel et de l’argent, qui s’empare du plus intime de nos vies et saccage nos écosystèmes.
Le sous-titre explique bien la visée de l’ouvrage: écologie, parce qu’il s’agit de prôner une société organique plutôt que la société artificialisante – donc déshumanisante – que nous subissons de plein fouet depuis la fin du XXe siècle. Écologie intégrale, parce que cette société réconcilie l’homme avec l’univers dont il dépend et dont il est responsable, alors que la société de marché abîme l’homme et détruit la nature.
Il s’agit de comprendre que tout ce qui nous préoccupe en ce moment, dans des domaines très différents, de la morale familiale aux crises sociales, de l’impasse économique au désarroi culturel, tout cela s’explique par un véritable dérapage de civilisation. Pourquoi ce dérapage? Comment ne pas être dupe de la pensée unique dans laquelle notre classe politique et médiatique continue à tourner en rond? Mais aussi, comment ne pas nous replier sur des bastions illusoires, au risque de nous racornir sur des préjugés de milieu ou de petits groupes ? J’ajouterai que ce repli serait le contraire de ce que nous demande le Christ à la fin de l’Évangile, donc le contraire de ce que nous demande le pape François, qui nous enjoint de « sortir » pour aller, dit-il, «vers les périphéries »... Périphéries où nos frères incroyants souffrent et se débattent eux aussi, dans tous les domaines de la crise de civilisation. Et surtout : quelle issue trouver à cette crise de civilisation ?
S’opposer à cette fuite en avant destructrice, c’est faire le choix radical de la sobriété. Moins mais mieux: vivre plus simplement pour que chacun puisse simplement vivre. Veiller sur l’avenir, en respectant notre fragilité et celle de notre environnement. Face à la technique sans âme et au marché sans loi, l’écologie intégrale offre ainsi l’espérance d’un monde à la mesure de l’homme, fondé sur l’entraide et le don, fruits de nos limites.