Retrouvez Nos Limites dans le prochain numéro de Sciences Humaines !
Peut-être vous souvenez-vous des Veilleurs, ce mouvement en marge des « manifs pour tous », se réclamant d’une jeunesse croyante et soucieuse d’éthique ? Cet essai, écrit par trois veilleurs, se veut à la fois bilan et manifeste. Cela dit, de mariage pour tous il n’est pas question. Le livre surprend au contraire par une posture que l’on pourrait qualifier d’« anarchist tory » (anarcho-conservatrice) ou, si l’expression a un sens, de « situationniste-chrétienne » : les auteurs ont élargi leur point de vue en présentant une critique ambitieuse de la société postmoderne et de son rapport à l’humain en général. Selon les auteurs, en s’appuyant sur le mythe d’un individu autodéfini et sans cesse soucieux de s’émanciper, un tel projet de société oublierait que les déterminismes culturels ne sont pas uniquement des contraintes, mais aussi les conditions de l’identité de chacun. En refusant d’accepter ses propres limites, l’humanité ne saura, selon eux, se construire un destin à sa mesure, mais se retrouvera jouet et produit de l’histoire, de la science et du marché.
Pour étayer leur thèse, les auteurs convoquent un large corpus de références, de Georges Bernanos à Simone Weil en passant par la culture populaire et la science-fiction. Ce petit livre doit être lu comme une réponse à la tendance de certains partisans des OGM, du transhumanisme ou de la GPA – et de diverses causes défendues au nom du progrès – à présenter ces manipulations, qui soulèvent des questions éthiques complexes, comme des avancées incontestables.
On regrette cependant que la ligne claire et simple du livre laisse peu de place à la nuance, ce qui laisse l’impression que, pour les auteurs, l’aspiration à l’émancipation et au progrès techniques est intrinsèquement dangereuse. Or le danger vient sans doute davantage de la confiance béate que certains leur accordent.